Il fut un temps où l’on recyclait sans le savoir. D’ailleurs, le mot n’existait pas avant de devenir sigle et slogan : il ne figurait même pas dans les dictionnaires. Il n’a surgi qu’en 1974, foi de Robert. Donc, on recyclait bêtement, naïvement, méthodiquement, en toute innocence. 

Dans les rues de Paris, des gamins ramassaient les bouteilles vides, chipant parfois la bouteille du voisin. Ils les livraient au premier épicier venu qui leur donnait en échange quelques piécettes. En fin de mois, il arrivait que ces bouteilles vides, remisées dans un coin de la cuisine, apparaissent comme un petit trésor non négligeable. Nicolas de Staël, dont on fête cette année le centenaire de la naissance et qui savait ce qu’était la vie de bohême (« la vie dure », selon le titre d’un de ses tableaux de 1946) s’adonnait parfois à ce ramassage dans les rues. La razzia valait une, deux ou trois baguettes, voire un morceau de lard, allez savoir ! Une bouteille en verre, c’était un objet qui avait sa noblesse. Quelques années plus tard, il en ferait le sujet d’une de ses toiles majeures : Bouteilles dans l’atelier.

Le mot magique, c’était « consigne » ! Chacun savait qu’en achetant un litre de lait, de jus de fruits ou de vin, il s’acquittait du contenu et du contenant. Le verre avait son prix. Le prix du développement durable. Tout le monde entrait dans ce cercle vertueux consistant à restituer les bouteilles consignées avant qu’elles ne soient lavées et recyclées à l’infini. Depuis, nous sommes tous devenus écolos, nous avons maudit le verre et inventé les bouteilles en plastique que nous balançons partout. Cherchez l’erreur ! 

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