Le redécoupage électoral n’est pas une spécialité gauloise. Le charcutage des circonscriptions par le parti au pouvoir est né, en fait, aux États-Unis en 1811 ! Le gouverneur du Massachusetts de l’époque se concocte alors une circonscription sur mesure en forme de salamandre. La contraction de son nom – Elbridge Gerry – et du mot anglais pour salamandre – salamander – donne naissance au terme qui désigne encore aujourd’hui cet usage : le gerrymandering

Si l’élection des 100 membres du Sénat américain ne se prête pas à ce type de manœuvre (deux sénateurs élus par État pour six ans au suffrage universel direct, avec un renouvellement par tiers tous les trois ans), la carte électorale de la Chambre des représentants est en revanche à géométrie variable. Depuis 1913, cette institution compte 435 sièges. Chiffre confirmé en 1963 sur la base du recensement de 1960. Les 50 États disposent d’un nombre de représentants proportionnel à leur population. Les 7 les moins peuplés (Wyoming, Montana, Vermont, Dakota du Nord et du Sud, Alaska, Delaware) n’en ont qu’un. À l’autre bout, la Californie en compte 53, New York 29, la Floride 25, etc. Le district de Columbia (Washington), lui, n’a pas de représentant.

Cette équité démographique dissimule, au vrai, bien des trafics. Les États ayant plus d’un élu peuvent modifier tous les dix ans le découpage de leurs districts électoraux en fonction du dernier recensement. À cette occasion, les discriminations ethniques sont interdites mais l’habileté politique est plus que tolérée. Les ciseaux sont tenus par la majorité qui contrôle l’État. Elle ne se prive donc jamais de conforter ses positions. Résultat : l’incertitude est faible lorsque cette Chambre est renouvelée tous les deux ans au suffrage universel direct. Les neuf dixièmes des élus sont certains de retrouver leur fauteuil au Congrès. En fait, seulement 10 % des districts sont susceptibles de basculer. 

La dernière opération de dentelle électorale, en date de 2010, a permis aux républicains de renforcer leurs positions. Depuis, ils disposent de 54 voix de majorité à la Chambre des représentants dont ils sont pour l’heure inexpugnables. Ce qui fait de la cohabitation la règle quand la présidence est démocrate.

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