C’est au cœur des glaciers et au milieu des volcans, loin des hommes, des arbres, des saumons et des rivières que je l’ai trouvé, ou que lui m’a trouvée. Je marche sur ce plateau d’altitude aride sur lequel je n’ai a priori rien à faire, je sors du glacier, je descends du volcan, derrière moi la fumée crée un halo de nuages. Je m’imagine seule pour toutes les raisons personnelles historiques et sociales que l’on sait mais pourtant je ne le suis pas. Un ours tout aussi déboussolé que moi se promène lui aussi sur ces hauteurs où il n’a rien à faire non plus, il est presque comme un alpiniste alors, c’est vrai que fait-il là, sur cette terre dégarnie sans baies ni poissons alors qu’il pourrait être tranquillement en forêt en train de pêcher ? Nous tombons l’un sur l’autre, si le kairos doit avoir une essence c’est celle-ci. Une aspérité du terrain nous cache l’un à l’autre, la brume monte, le vent ne souffle pas dans le bon sens. Quand je l’aperçois il est déjà devant moi, il est aussi surpris que moi. Nous sommes à deux mètres l’un de l’autre, il n’y a pas d’échappatoire possible, ni pour lui ni pour moi. Daria m’avait dit, si tu rencontres un ours, dis-lui « je ne te touche pas, tu ne me touches pas non plus »

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