La gare de Fort d’Issy-Vanves-Clamart

Mickaël Raffegeau, architecte. Chef de projet au sein de l’agence Philippe Gazeau qui a notamment conçu les logements des postiers de la rue de l’Ourcq, dans le XIXe arrondissement de Paris, ainsi que le centre culturel de Mouans-Sartoux, en région PACA. L’agence est aussi en charge de la réalisation de la gare de Villejuif-Louis Aragon, dans le cadre du Grand Paris Express.

La particularité de cette gare est qu’elle se situe au carrefour de quatre territoires (Issy-les-Moulineaux, Vanves, Clamart et Malakoff) qui sont aujourd’hui coupés par un faisceau ferroviaire : tout un ensemble de voies ferrées parallèles et de hangars. Notre intention première est d’établir, à travers la gare, une vraie connexion entre ces communes. Nous avons ainsi imaginé, sous ce faisceau, un vrai passage urbain ouvert et accessible directement grâce à une multitude d’entrées. Autre ligne directrice du projet : recréer des parvis généreux pour réintégrer de la vie et des commerces au pourtour de la gare, un espace aujourd’hui dominé par les habitations. La nouvelle gare respectera le matériau de base de son infrastructure, un béton très simple. Vitrages et inox permettront de travailler un maximum sur les reflets et de s’adapter à la topographie assez complexe du lieu, particulière pour sa végétation et ses différents niveaux. L’ouverture de la gare de Fort d’Issy-Vanves-Clamart est prévue pour 2022. 

 

La « gare-pont » de Saint-Denis Pleyel

Matthieu Wotling, architecte. Chef de projet de l’agence de l’architecte japonais Kengo Kuma qui a notamment réalisé la Cité des arts et de la culture de Besançon, le FRAC de PACA à Marseille et le conservatoire d’Aix-en-Provence (2013).

Saint-Denis Pleyel est conçue comme une gare-pont : le pont et la gare se fondent dans un seul bâtiment sans marquer de limites claires entre l’un ou l’autre. L’effacement des limites entre le parvis, la toiture et le pont a été le guide de notre conception architecturale. La gare elle-même devient une place publique. Elle est conçue comme une extension du parvis à plusieurs niveaux de façon à offrir ce grand espace, participant au renouveau du quartier Pleyel. Elle assure également une continuité en profondeur, en faisant rentrer la lumière naturelle jusqu’au cœur des niveaux souterrains, où l’utilisation récurrente du bois marque l’identité forte de la gare. Elle accompagne les voyageurs au long d’un parcours dosé de lumière et de matières, où les sens s’éveillent d’une manière différente à chaque étape pour progressivement passer de la ville aux quais.

Le projet prévoit également l’intégration d’une médiathèque augmentée, ainsi que des espaces de coworking. Ces programmes complémentaires, totalement imbriqués dans le bâtiment de la gare, constituent une innovation et un véritable défi : celui d’offrir des lieux de rencontre et d’échange de qualité pour les usagers et les habitants de Saint-Denis. Le site de la construction de la gare est localisé sur un secteur aujourd’hui isolé de la Plaine-Saint-Denis par le passage du réseau ferré. La gare est un maillon fort de ce franchissement urbain et de la future activité du secteur Pleyel, qui fait l’objet d’une vaste étude de revalorisation urbaine. 

Saint-Denis Pleyel est l’une des gares les plus importantes du réseau Grand Paris Express. Son pôle d’échange, qui intègre un croisement de quatre lignes de métro ainsi que la connexion au RER (D et potentiellement H), représente un flux de voyageurs prévisionnel de 250 000 passages par jour. 

 

Le « Central Park » de La Courneuve

Roland Castro, architecte. Animateur avec l’urbaniste Michel Cantal-Dupart de la mission interministérielle Banlieues 89 (1983-1991), créateur du Mouvement de l’utopie concrète lancé en 2003, il a mené de nombreux chantiers de réaménagement de quartiers populaires avec la volonté de « créer du lien et du lieu ». Il est l’un des dix architectes à avoir participé à la consultation « Le Grand Pari(s) de l’agglomération parisienne » en 2008-2009.

Le parc de La Courneuve est un espace immense, bien plus grand que celui de Central Park à New York.  Sa superficie fait rêver : plus de 400 hectares. Avec ses 11 kilomètres de circonférence, il borde six communes : La Courneuve, Saint-Denis, Stains, Garges-lès-Gonesse, Le Bourget et Dugny. Pourtant, il n’a aujourd’hui aucune interaction intéressante avec ce qui l’entoure. Notre projet est d’aménager les bords du parc sur une largeur de 100 mètres. Ces constructions pourront accueillir aussi bien des habitations que des institutions, des écoles ou encore des bistrots, des jardins suspendus et une agriculture urbaine. Ce « Central Park » est un élément déterminant dans la mise en place d’un Paris polycentrique, qui ne peut être représenté uniquement par un métro. Nous devons donner à la périphérie de Paris des lieux aussi importants et magiques que l’île de la Cité ou le musée du Louvre. Il faut multiplier les propositions et les réalisations extraordinaires en banlieue, ne pas se contenter de seulement bien faire. Car souvent, dès que l’on quitte le Paris aggloméré, on tombe sur un tissu explosé fait de zones industrielles, d’habitations et de circulation. Et ce parc, le plus grand d’Île-de-France, fait aujourd’hui partie de cet espace abîmé. 

 

Gare de Kremlin-Bicêtre Hôpital : « la culture du lieu »

Jean-Paul Viguier, architecte. Diplômé des Beaux-Arts de Paris et de l’université Harvard, il a signé plusieurs ouvrages majeurs dont le pavillon de la France à l’Exposition universelle de Séville (1992), le Sofitel de Chicago (2002) ou encore la tour Majunga (2014) à Paris. Il a ouvert ses carnets de dessins dans Jean Paul Viguier (Tallandier, 2013) et participé au livre Cher Corbu… Douze architectes écrivent à Le Corbusier (Bernard Chauveau, 2014).

La gare de Kremlin-Bicêtre prend la forme d’un gros caisson en béton, qui descend de 30 à 50 mètres de profondeur pour rejoindre la ligne 14. Pour ce projet, je me suis inspiré de l’extension du McNay Art Museum que j’ai réalisée à San Antonio, au Texas, en 2008, car à l’instar du musée, la gare est un lieu de déambulation et de flux. J’ai repris le principe des paravents, sous une toiture éclairée : à la place des œuvres, ces derniers accueilleront les affiches et les services d’information de la gare. Le toit est en bois et la présence de baies en verre permet à la lumière de s’infiltrer à l’intérieur du caisson. De manière générale, le modèle de la gare contemporaine est en rupture avec celui de la grande gare parisienne du XIXe siècle. Elle n’est plus conçue comme un monument. Aujourd’hui, la priorité pour l’architecte est de faciliter l’échange de flux qu’elle abrite quotidiennement. Ces flux sont multiples puisque l’on peut arriver à la gare par le métro ou à vélo, en repartir à pied ou en bus, ou bien encore récupérer sa voiture stationnée le temps de son voyage. J’essaye ainsi de rendre le parcours du voyageur le plus fluide et confortable possible. Plus largement encore, le projet du Grand Paris Express est lui-même en rupture avec le modèle traditionnel de circulation de la région parisienne, très daté. Il permet d’aller de banlieue en banlieue sans avoir nécessairement besoin de repasser par le centre. Il n’est pas conçu, non plus, de manière circulaire comme peut l’être le tramway de Paris. Pour les lieux que les gares du Grand Paris Express dessert, il s’agit donc d’une vraie occasion de devenir un pôle de centralité et de développement qui doit, dans ma vision des choses, s’ancrer dans la culture du lieu. Le sens de l’époque est, en ce qui concerne les gares, de retrouver les racines du lieu qui les accueille. 

 

 

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