On n’arrête pas de qualifier Abdelaziz Bouteflika de momie. Ce n’est pas très gentil pour les momies. Il ne faut d’ailleurs pas tout mélanger. Ni Ramsès II ni Séthi Ier, qui reposent côte à côte au musée du Caire, ne réclament un nouveau mandat. S’ils ont fait en sorte, il y a trente-deux siècles, d’être soigneusement embaumés, ce n’était pas pour s’accrocher au pouvoir : il y allait de leur vie posthume. En effet, selon la religion égyptienne, la conservation du corps était l’une des conditions essentielles pour que le défunt accède à l’éternité. Dès qu’il montait sur le trône, un pharaon, se sachant mortel, ordonnait et surveillait la construction de sa tombe.

Bouteflika, lui, n’est pas tout à fait mort, d’après ce qu’on dit. C’est une éternité politique qu’il vise, ou que son entourage a choisie pour lui. L’attachement de ce clan à la démocratie le perdra. Pourquoi organiser des élections tous les cinq ans ? Pourquoi vouloir à tout prix l’assentiment du peuple ? On est loin de la sagesse des fils d’Osiris ! À la fois homme et dieu, possédant toute l’Égypte et même la terre entière, le pharaon était le garant de l’ordre universel. Sans lui, le soleil n’était pas sûr de se lever ou de se coucher. Afin de lui redonner périodiquement la force magique nécessaire pour accomplir sa mission, une fête spéciale était célébrée au bout de trente ans de règne et pouvait être suivie d’autres, à intervalles plus courts. 

Le pouvoir algérien n’aurait-il pas dû prendre des précautions similaires ? On a laissé ce pauvre Bouteflika sans célébrations. Et, aujourd’hui, c’est la rue qui lui fait sa fête. 

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