Voilà vingt ans que des migrants venus de loin s’enlisent sur un bout de lande, entre Calais et Dunkerque. Leur nombre varie selon les années. Parfois quelques centaines, parfois plusieurs milliers. À peine arrivés, ces transhumants clandestins espèrent franchir la Manche à bord d’un ferry ou d’un camion. Un rêve qui met souvent des mois à se réaliser. Durant cette période, ils éprouvent pêle-mêle un petit miracle et un cauchemar. Le miracle, c’est l’accueil, la solidarité manifestée sur place par les bénévoles des associations caritatives. Des Français, des Belges, des Néerlandais et désormais une foule d’Anglais leur viennent en aide. Le cauchemar, ce sont les enclos de terre et de sable, de boue et de gadoue dans lesquels ils sont parqués ; c’est l’absence, organisée par les pouvoirs publics, d’une infrastructure décente pour loger ces hommes et ces familles éreintés.

Combien sont-ils ? Moins de huit mille. À qui fera-t-on croire que l’État ne peut leur fournir provisoirement un toit et une douche chaude ? Qui peut admettre que ces migrants soient condamnés à vivre exposés au froid parmi les ordures ?

De Calais à Dunkerque, c’est pourtant la réalité admise, acceptée depuis le milieu des années 1990. Les autorités françaises n’ont pas l’impudence de déclarer comme le gouverneur belge de Flandre-Occidentale : « Ne les nourrissez pas sinon d’autres viendront ! » Mais c’est bien cette politique qui est appliquée en silence. Abandon, laisser-faire, laxisme… L’État s’est habitué à cette indifférence. Et nous ? 

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