Apathie ou révolte, indifférence ou protestation, la lecture des dynamiques électorales en France peut prendre des directions contradictoires. Peut-on parler d’une révolution électorale en marche ? La révolte semble bien passive, même si la défiance à l’égard des partis de gouvernement est indéniable.

Le scrutin du 25 mai est-il alors le révélateur des conséquences politiques de la crise économique que la France traverse depuis bientôt sept ans ? L’influence de cette crise sur la participation est généralement limitée, mais le soutien au gouvernement est lui automatiquement affaibli par l’aggravation des difficultés économiques. Enfin, il n’existe pas d’effet systématique sur la polarisation, une crise économique pouvant tout autant conduire à un sursaut d’unité nationale qu’au durcissement des confrontations. Toutefois, une conjoncture dégradée tend à favoriser le repli sur soi, le rejet de l’autre et l’aversion au changement.

La France aujourd’hui semble largement se conformer à ces conclusions. Notons que, malgré sa reconnaissance institutionnelle nouvelle, le vote blanc n’augmente pas en 2014, diminuant même légèrement par rapport à la précédente élection de 2009. Mais on est loin d’un renouveau de la mobilisation électorale. Cette démotivation correspond d’ailleurs également à l’échec chronique des mobilisations sur les thèmes économiques depuis plusieurs années. Le fait que les seules grandes manifestations depuis l’apparition de la crise économique ont eu pour objet le mariage pour tous en est le symbole.

La désapprobation grandissante à l’égard de François Hollande n’est pas fondamentalement différente de celle qu’avait connue Nicolas Sarkozy avant lui, démontrant que c’est bien le contexte général qui est ici structurant. Dans une recherche menée à l’occasion de l’élection présidentielle de 2012, nous avions mesuré l’impact de la conjoncture économique sur les choix de vote. La conclusion générale en était que la perception de la croissance favorisait bien sûr un vote contre le président sortant. Mais cette influence restait limitée par rapport aux autres grandes variables (positionnement gauche-droite, pratique religieuse, classe sociale…). La crise économique ne parvient pas à expliquer pleinement la situation enregistrée le 25 mai. Ce que l’on observe aujourd’hui reflète largement des tendances de plus long terme, décelables depuis au moins le début des années 1980.

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