Le débat sur la simplification du Code du travail est malhonnête. Ce n’est pas en modifiant la loi qu’on va régler les problèmes économiques. Les patrons ont toujours expliqué que pour embaucher, il fallait qu’ils puissent licencier facilement. Cela ne s’est jamais vérifié. Jusqu’en 1986, quand un chef d’entreprise souhaitait licencier un employé pour motif économique, il devait demander l’accord à l’inspection du travail. Dans 90 % des cas, la requête était acceptée. Mais les patrons se plaignaient, invoquant une procédure trop compliquée. Ainsi, l’autorisation administrative de licenciement a été supprimée. Il n’y a pas eu plus d’embauches. 

Autre exemple en 2008 : les accords nationaux interprofessionnels signés par la CFDT permettant la rupture conventionnelle du contrat de travail. Il s’agit d’un simple formulaire à remplir, sans aucun motif à donner, qui ­s’accompagne d’une impossibilité pour le salarié de saisir les prud’hommes. On fait supporter à Pôle emploi les indemnités des 400 000 ruptures conventionnelles signées annuellement. Cela n’a pas eu d’impact sur l’embauche.

Ce n’est pas la complexité de la norme qui fait ou qui défait l’emploi. Et les propositions du Medef vont rendre les choses encore plus compliquées : décentraliser la norme et la fabriquer au plus près de l’entreprise la rendra plus obscure. Cela signifie que lorsque l’on change d’entreprise, on change de droit. Sortir de la norme étatique risque de fragiliser les salariés. Et d’augmenter la violence. Quand le droit se morcelle et qu’on n’a plus de recours, on prend plus facilement son fusil. 

Le droit du travail s’est construit sur tout un siècle, des congés payés aux 35 heures. Aujourd’hui, on vient nous expliquer qu’il faut travailler plus : une ânerie historique. Je me rappelle d’un slogan qui circulait dans les années 1980 : «Travailler moins pour travailler tous. » On devrait revenir à cet état d’esprit. Il faut aussi préciser que le Code du travail a été entièrement révisé en 2008, en vue de le rendre plus clair et d’en simplifier la langue. Ce qui empêche les entreprises d’embaucher, ce sont les frais fixes. Le droit du travail ne sera jamais complètement satisfaisant pour les employeurs. 

 

Propos recueillis par ELSA DELAUNAY

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