Au milieu du salon, la maman de Jereyam essaye tant bien que mal de lui enfiler son manteau. Le garçon se débat. Il cherche à échapper à son rendez-vous hebdomadaire avec Marjory, volontaire à l’Afev, une association étudiante qui lutte contre les inégalités dans les quartiers populaires.

Chaque mardi après-midi depuis six mois, cette Antillaise de 21 ans consacre deux heures de son temps au garçon pour l’aider à faire ses devoirs. L’accompagnement se déroule dans les locaux de l’association, à deux pas de l’université de Nanterre, où Marjory prépare par ailleurs sa licence en sciences du langage.

« La famille de Jereyam est indienne, explique-t-elle en ouvrant devant lui un livre d’images. À la maison, ses parents lui parlent tamoul et il leur répond en français. Comme il n’est pas habitué à rencontrer du monde en dehors de l’école, il a peur de parler. C’est sur ce point que j’essaye de travailler. »

Son engagement, la jeune femme en a fait la preuve dès le début de sa mission en prenant l’initiative de rencontrer la maîtresse. « J’ai voulu comprendre quelles étaient les réelles lacunes de Djé et réfléchir avec elle à des activités qui soient complémentaires de son programme scolaire. L’enjeu est grand, il risque de ne pas passer en CP. »

Une lourde responsabilité pour l’étudiante, qui semble y trouver son compte. « Ici, tout le monde apporte quelque chose à l’autre. On s’investit beaucoup pour les enfants, mais en contrepartie nos tuteurs sont là pour nous aider dans notre vie universitaire et pour préparer notre entrée dans le monde du travail. »

L’encadrement ne concerne pas uniquement les enfants. En plus des trois entretiens annuels obligatoires, les volontaires font le point chaque semaine avec leur tuteur. Ils possèdent tous un carnet de bord ainsi qu’un portefeuille de compétences qui leur permettront de mettre en valeur leur expérience de volontaire lorsqu’ils chercheront un emploi.

En 2006, l’arrivée des premiers volontaires du service civique a chamboulé l’organisation de cette association nationale qui fonctionnait, depuis 1991, sur le principe du bénévolat. L’emploi du temps des salariés a été réorganisé afin qu’ils puissent se rendre disponibles pour ces jeunes que Clélia Fournier, responsable de l’antenne des Hauts-de-Seine, considère comme des « bénévoles-salariés ».

« Pour nous, Marjory est le profil idéal. Elle a commencé comme bénévole pour devenir volontaire au bout de quelques mois. Elle connaissait alors très bien l’association, ses objectifs, son état ­d’esprit, et était capable d’aller recruter des jeunes sur le campus. » 

Aller à la rencontre des étudiants pour leur faire connaître l’Afev fait également partie de la mission. « Lorsque j’ai présenté l’association devant un groupe de personnes pour la première fois, ma responsable a dû venir plusieurs fois à ma rescousse, se souvient Marjory. J’étais tellement timide que je n’arrivais pas à parler. Depuis, je me débrouille beaucoup mieux. »

D’ailleurs, il semblerait qu’elle ne soit pas la seule à avoir fait des progrès. « Un, deux, crois… » Penché sur son livre d’images, Jereyam compte les œufs de la poule à haute voix. 

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