À l’Éducation nationale, les travaux en matière de laïcité sont nombreux et intelligents. Comment les mettre en œuvre ? La réponse est surtout managériale. Le système éducatif français ne parvient pas à gérer la contradiction entre la masse (12,3 millions d’élèves, 840 000 enseignants) et l’éclatement de ses structures opérationnelles : 64 000 établissements, environ 500 000 classes. Dans ces conditions, le ministère est absorbé par les tâches de gestion : pas facile de mettre un professeur dans chaque classe, à chaque rentrée ! 

Deux hiérarchies parallèles coexistent. À l’une, la pédagogie, via les corps d’inspection en charge des concours de recrutement, des disciplines et du contrôle académique de leur mise en œuvre. À l’autre, la gestion, la marche matérielle et financière de l’institution. Ainsi le ministre ne peut-il agir que sur « l’accessoire », et non sur l’essentiel, l’enseignement. De même, à la base, le chef d’établissement n’a guère d’autorité pédagogique sur les professeurs. Conséquence : une grande inertie de l’institution. Il faut parfois des années pour qu’une impulsion ministérielle soit appliquée par des professeurs consciencieux mais qui travaillent le plus souvent seuls dans leurs classes . Le redressement de l’institution scolaire impose donc deux actions complémentaires. D’une part, la définition par le Parlement des objectifs que la France assigne à son école, pour aujourd’hui et surtout pour demain, afin d’établir un consensus dans la société. D’autre part, la levée des verrous qui, au sommet, bloquent les évolutions – faut-il laisser perdurer la double hiérarchie ? – et, à la base, empêchent la mise en œuvre de réels projets d’établissement. Pour mener de tels chantiers, on souhaite à la ministre une vision, du courage et une certaine longévité dans ses fonctions. Ce temps-là serait-il arrivé ?  

Propos recueillis par E.D.

 

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