Quelle est votre relation aux livres ?

C’est une relation passionnelle et fusionnelle depuis l’enfance. Ma grand-mère en particulier a très tôt installé dans ma vie la compagnie des livres. Il n’est pas pour moi aujourd’hui de jour sans livre. Mon entourage me reproche même parfois de ne savoir rien offrir d’autre que des livres ! Le livre qui ne me quitte jamais, c’est Les Fleurs du Mal. Un bréviaire du monde et de l’âme. 

Quels sont les derniers livres qui vous ont marqué ? 

Dernièrement, Le Cahier noir, de Mauriac, et L’Affaire Vargas, de Pessoa.

Un auteur et un roman ont-ils marqué votre jeunesse ?

Oui, indiscutablement Céline et Voyage au bout de la Nuit : cette lecture, à l’adolescence, fut un choc esthétique et émotionnel très fort. Bardamu ne m’a plus quitté. 

Quels personnages de fiction vous inspirent ? 

J’avoue un faible pour ces héros romantiques que la vie expose à l’inconnu, au danger, aux grands espaces. C’est pourquoi j’aime beaucoup Fabrice del Dongo, qui se jette sur les routes avec une inconscience crâne. 

François Mitterrand aimait lire et écrire. Même chef de l’État, il trouvait le temps de lire. Est-ce important pour vous de trouver ce temps ?

Que le temps soit bref ou long, il reste toujours assez de temps pour lire. Et il faut toujours trouver du temps pour lire. Pas un jour ne passe sans que je lise. Ce n’est pas un délassement, c’est un pain quotidien.

Vous avez écrit un roman dans votre jeunesse. Avez-vous été tenté par une aventure littéraire ?

J’ai écrit en effet un roman épique : Babylone, Babylone. J’y racontais de manière un peu décalée l’aventure de Hernán Cortés. Il n’a eu qu’une seule lectrice, mon épouse, et n’en aura pas d’autres. La vocation littéraire est évidemment une tentation permanente, mais c’est une vocation dévorante, plus encore sans doute que la politique. Je l’ai mise en sommeil. La vie me dira si elle reprendra à l’avenir le dessus.

Avec quel écrivain aimeriez-vous échanger sur le monde qui vient ?

J’aime la sagesse brève de Pascal Quignard, dont le regard porte loin dans le passé et nous instruit sur notre présent, trop souvent vécu à la surface. J’aurais aimé échanger avec Michel Tournier, dont les livres m’ont tant marqué.  

En quoi la culture permet-elle, à vos yeux, de saisir les mouvements de la société ?

La culture n’est pas un département hermétique de nos vies, elle n’est pas cette tour d’ivoire qu’on aimerait parfois nous présenter, superbement isolée du reste des fluctuations sociales. Elle irrigue notre histoire, nos échanges, elle est le souffle qui nous anime. La culture, c’est la pensée et l’émotion jointes dans la représentation. Aucune activité humaine ne vaut si elle ne porte en elle ce germe de culture, si elle n’est exhaussée par elle. La culture est le seul horizon valable de notre existence.  

Extraits d’un entretien recueilli par Éric Fottorino le 3 février et publié dans Macron par Macron aux éditions de L’Aube.

 

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