Comment percevez-vous ces mégaplateformes web apparues depuis une dizaine d’années ? 

Ce sont de nouvelles formes d’organisation dans la coordination de l’activité économique. Leur masse salariale, réduite, gère la relation au marché de milliers de gens ! Si, dans les années 1990, les bons élèves du marketing direct (La Redoute, Les 3 Suisses, etc.) travaillaient avec des bases de données et savaient quantifier l’information, aujourd’hui, grâce aux algorithmes, on automatise ces fonctions en faisant des usagers aussi bien des clients que des producteurs.

Comment Facebook est-il devenu un géant de l’économie ?

Facebook est aujourd’hui une « licorne », c’est-à-dire une entreprise qui vaut plus d’un milliard de dollars. Il l’est devenu un peu par hasard. En 2004, lors de sa création, il existe déjà des réseaux sociaux trombinoscopes, mais Facebook arrive à améliorer ce qui se fait en étant réservé initialement à un cercle réduit d’usagers : c’était un réseau de réseau qui, sur une petite population, a atteint une forte densité de pénétration. Cela explique sans doute la valeur ainsi gagnée, car un réseau social a d’autant plus de valeur qu’on a des proches qui y sont inscrits. Le taux de pénétration que Facebook atteint aujourd’hui au niveau mondial prouve que l’on touche là un besoin humain qui n’était pas exprimé en l’état mais qui remplit pas mal de fonction dans la vie quotidienne. D’un point de vue financier, son ascension a été nourrie par un financement hyperspéculatif : on accepte de perdre dix fois pour gagner une fois, et, dans ce cadre, les entreprises sont elles-mêmes des produits. Le financement de Facebook n’est assuré que depuis cinq ans, par un modèle publicitaire adapté.  

Propos recueillis par ANNE-SOPHIE NOVEL

 

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