Nommé à la tête de la Fondation pour l’islam de France, Jean-Pierre Chevènement a conseillé aux musulmans la « discrétion dans l’espace public, en cette période difficile ». Le mot a fait polémique, alors que l’ancien ministre de l’Intérieur, peu suspect d’islamophobie, ne faisait que paraphraser l’imam bordelais Tareq Oubrou, qui appelle régulièrement ses coreligionnaires à faire preuve de « visibilité modérée » pour mieux s’intégrer dans la société française.

« Discrétion » a des sens très différents. Il ne saurait s’agir ici de la qualité de garder des secrets : le Coran n’a rien à cacher. Les musulmans n’ont pas non plus à se mettre « à la discrétion » de quiconque, ce qui signifie dépendre entièrement de lui. Et encore moins à se « rendre à discrétion », c’est-à-dire capituler sans condition et se soumettre aux exigences du vainqueur… comme cela a été longtemps imposé aux chrétiens et aux juifs, citoyens de seconde zone en terre d’islam.

Dans son sens originel, la discrétion, du latin discretio (discernement), est la capacité de bien juger d’une situation. Impliquant la réserve et la modération, c’est l’art d’éviter les actes ou les paroles qui peuvent peiner, gêner ou choquer.

Tout le monde, et pas seulement les musulmans, devrait être invité à la discrétion. Ce concept est bien difficile à « vendre » dans une société du vacarme et du paraître, sinon de l’exhibition sur Internet. Il ne s’agit pas de raser les murs, de se dissoudre et de disparaître, mais d’éviter de s’imposer avec ostentation et d’occuper l’espace. La discrétion est une manière intelligente de vivre ensemble. 

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